#8 Rompre avec la souffrance

Choisir de se libérer de la valorisation des difficultés

Cher internet,

J’espère que tu vas bien.

Moi ça va, le mood c’est :

Je me sens comme un animal transporté dans une cage, sous un bras, entre deux gares de banlieue.

Fernando Pessoa - Le livre de l’intranquillité

Aujourd’hui, j’aimerais te parler d’un sujet légèrement pesant : le rapport à la souffrance.

“La souffrance”.

Je parle d’un truc valorisé, parfois recherché comme un passage obligatoire pour atteindre nos objectifs.

Je parle de l’inconfort, de la gêne, du grain, de la friction.

“Ça forge le caractère” — “Ça lui fera les bottes” — “Il faut apprendre à en chier”

Ce genre d’expression me rend furieux.

Faut-il vraiment souffrir pour réussir ou se sentir légitime ?

et paf c'est comme ça qu'on apprendet paf c'est comme ça qu'on apprend

Le mythe de la souffrance nécessaire

C’est courant de se référer à des modèles de souffrance comme des éléments positifs.

Être fataliste et valoriser les parcours douloureux comme preuves de légitimité est une idée profondément ancrée.

J’entends souvent des phrases comme : “J’ai un parcours atypique”, sous-entendu “j’ai souffert pour en arriver là”.

C’est vrai que certaines épreuves nous apprennent des leçons importantes et nous aident à grandir. Cependant, je ne parle pas ici de l’effort nécessaire pour avancer, mais de l’idée que la souffrance doit faire partie du processus.

Pour moi, l’effort n’est pas nécessairement lié à la souffrance.

On valorise souvent ceux qui ont traversé des périodes difficiles, ceux qui ont “en bavé”.

On les admire pour leur résilience, pour leur capacité à surmonter l’adversité. Et c’est vrai, il y a une forme de noblesse à affronter et surmonter les obstacles. Mais ce qui compte vraiment, ce n’est pas la souffrance en elle-même, mais ce que l’on apprend et comment on grandit à travers ces expériences.

Faire face à des problèmes complexes, résoudre des situations difficiles, cela fait partie de la vie. Une dose de souffrance est normale, et même saine parfois. Elle nous pousse à évoluer, à nous adapter.

Mais il y a une ligne fine entre accepter la souffrance comme une partie du processus et la valoriser à tel point qu’elle devient un objectif en soi.

C’est là que le rapport peut devenir flou.

lezgo to schoollezgo to school

On peut vite tomber dans le piège de croire que plus on souffre, plus on mérite de réussir. Que la douleur est un gage de légitimité. Mais ce n’est pas parce que l’on a souffert que l’on mérite d’y arriver. Ce n’est pas une monnaie d’échange pour le succès.

Valoriser la souffrance peut mener à des comportements autodestructeurs. On peut commencer à chercher délibérément des situations inconfortables, des défis trop grands, juste pour prouver quelque chose à soi-même ou aux autres. On oublie alors de chercher des solutions, de trouver des moyens plus doux et plus efficaces de progresser. On s’enferme dans un cycle qui ne mène nulle part.

Reconnaître la différence entre l’effort et la souffrance. En fait il s’agit de ça.

L’effort est un engagement, une énergie que l’on met pour atteindre un objectif.

La souffrance, elle, est une réaction émotionnelle, une douleur que l’on subit.

Refuser l’inutile - Embrasser la vision

À l’école, je me suis souvent heurté à cette thématique.

J’ai fait des études d’arts, le genre du cursus où l’on nous pousse à tester un maximum de choses.

Je refusais d’explorer des techniques que je n’avais aucune envie d’approfondir.

Parce qu’au fond de moi, je savais que le pastel sec, ce n’allais jamais être mon truc.

Mon professeur disait : “Si tu n’essaies pas et que tu ne souffres pas un peu, tu passes à côté de la possibilité que cela te plaise quand même. Et au pire, tu auras des raisons de retourner là où tu te sens bien.”

Ce dilemme m’habite depuis.

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Est-il vraiment nécessaire de s’exposer à la souffrance ou à la difficulté quand on est satisfait de sa situation ? Parfois, il vaut mieux profiter de ce que l’on a et apprendre à conserver cette satisfaction sans culpabiliser.

La culpabilisation de ne pas souffrir assez, de ne pas se pousser jusqu’à l’extrême, est omniprésente.

La société valorise ceux qui se lèvent à 4h du matin pour courir, qui ont monté trois entreprises avant 30 ans, qui embrassent la difficulté comme un trophée.

Cette mentalité est souvent véhiculée par les réseaux sociaux, les coachs de vie, et une culture de la performance exacerbée.

Ne pas toujours prendre le chemin de la souffrance, c’est certes passer à côté de certaines opportunités, mais c’est aussi préserver son bien-être et son équilibre.

Ma grille de lecture est différente.

Je valorise la finalité et le plaisir.

Si je vois quelqu’un d’heureux et épanoui, j’ai envie de savoir ce qu’il a fait pour en arriver là.

J’ai besoin d’être inspiré par des résultats tangibles, concrets.

La souffrance, si elle fait partie du processus, ne doit être qu’un élément parmi d’autres sur le chemin à parcourir.

Laissez moi tranquilleLaissez moi tranquille

Rompre avec la souffrance

J’ai fait un long bout de chemin avec la souffrance.

Aujourd’hui, j’essaie de rompre avec elle.

Je m’imagine assis dans un café avec elle, touillant la paille dans mon verre, en cherchant mes mots et mon courage. J’ai envie de lui dire que c’est ma faute, pas la sienne. Qu’elle est belle et nécessaire, mais que je veux tenter l’aventure sans elle.

Toi et moi on a passé beaucoup de temps ensemble. Tu m’as appris des leçons importantes, m’as forgé et m’as aidé à grandir. Mais maintenant, j’ai besoin qu’on avance chacun de notre côté un peu.

J’ai besoin de découvrir ce que la vie a à offrir sans toi.

À partir de quel moment la souffrance est-elle inhérente au processus, et à partir de quand devient-elle intolérable ? La ligne est mince et souvent floue. Comme un amour toxique, il arrive un moment où la relation cesse de nous enseigner quelque chose de nouveau et commence à nous freiner, à nous alourdir.

“Tu as été une copine fidèle, une épaule pour mes échecs et de mes peurs.
Mais j’apprends à reconnaître mes forces et à puiser dans des ressources plus positives.
Je ne te renie pas, bien au contraire, mais je choisis de ne plus te laisser diriger ma vie. Je veux me souvenir de nous, comme d’un duo qui a su traverser des moments forts.
Alors, souffrance, je te dis au revoir pour l’instant, je sais qu’on se re-croisera.
À plus,

Je t’embrasse”


Merci d’avoir partager ce petit moment avec moi. J’espère qu’on aura raisonné ensemble.

Je suis toujours dispo pour discuter !

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À vite,

Prenez soin de vous ✌️💚

Robin

Sensibilité, internet, créativité (sic)

Par Robin MARZIN